lundi 10 septembre 2012

A-t-on vraiment intérêt à prendre exemple sur les meilleurs ?



 

Les entreprises ont souvent tendance à chercher l’inspiration chez leurs concurrents les plus performants. A priori, rien de plus naturel. On a sans doute beaucoup à apprendre des meilleurs. Pourtant cette démarche est souvent inutile. Dans certains cas, elle est même dangereuse ...

Une démarche souvent vaine … 
Un exemple suffit pour se convaincre de l’inutilité de prendre exemple sur les meilleurs. Lorsque l’on étudie les entrepreneurs qui ont connu les plus grands succès, on constate généralement deux choses :
  • ils ne se sont jamais découragés, même lorsqu’ils ont dû faire face à l’adversité ; 
  • ils sont toujours parvenus à persuader les autres de les suivre.

On pourrait alors être tenté de conclure que la persévérance et la capacité de conviction sont les clés du succès. Mais est-ce réellement le cas ? Pas forcément, car ces deux « qualités » sont également celles des entrepreneurs qui ont essuyé les échecs les plus retentissants … Alors que leur projet n’était pas viable, ils se sont acharné et ont entraîné tous les autres dans leur chute.

On pense souvent que l’on peut faire émerger les « recettes » du succès en étudiant des succès. De nombreux « best sellers » de management sont fondés sur ce principe. Ils commencent par sélectionner un échantillon d’entreprises performantes. Ils les analysent et identifient leurs points communs. Ils érigent alors ces points communs en « recettes » du succès. Comme l'ont montré les recherches menées par Jerker Denrell, cette technique ne fonctionne malheureusement pas. Si on étudie uniquement des succès, on ne pourra pas montrer ce qui les distingue des échecs (à part leur succès …). Il faut donc impérativement prendre en compte des succès et des échecs. Cette démarche est beaucoup plus difficile à mettre en œuvre car on dispose de plus d’information sur les entreprises florissantes que sur celles qui ont fait faillite après quelques années d’existence.

… et parfois risquée 
Prendre exemple sur les meilleurs est donc souvent inutile. Plus grave, cette démarche peut être dangereuse. Pour s’en rendre compte, on peut considérer la figure ci-dessous. Elle montre la relation entre les risques associés à la stratégie d’une entreprise et sa performance.



Lorsqu’une entreprise met en œuvre une stratégie peu ambitieuse (et donc peu risquée), son niveau de performance est généralement proche de la moyenne. En revanche, la mise en œuvre d’une stratégie plus ambitieuse donne lieu à des résultats plus contrastés. Dans certains cas, la prise de risque a payé et les résultats sont très bons. Dans d’autres cas, ils sont catastrophiques. En règle générale, le niveau de performance a même plutôt tendance à baisser.

Si l’on considère uniquement les entreprises performantes, on obtient la figure ci-dessous.



On peut alors être tenté de reproduire une stratégie qui a permis à certaines entreprises de réussir … mais qui a également mené de nombreuses autres à leur perte.

Focalisation ou diversification ?

Prenons un exemple. Dans un ouvrage à succès, le consultant Chris Zook a identifié 1.854 entreprises performantes. Il a alors constaté que 78% d’entre elles avaient adopté une stratégie de focalisation. Sa conclusion : il vaut mieux opter pour la focalisation que la diversification. Peut-on vraiment faire confiance à cette analyse ? Non, car la focalisation est plus risquée que la diversification. Si elle génère les gains les plus élevés (lorsque l’entreprise a choisi le « bon » domaine d’activité), elle peut également provoquer les pertes les plus importantes (lorsque l’entreprise a choisi un « mauvais » domaine d’activité). On retrouve donc aussi bien les entreprises les plus performantes que les entreprises les moins performantes parmi celles qui ont fait le choix de la focalisation.

Pour déterminer le lien entre le degré de diversification et le niveau de performance, on ne peut pas se contenter de mesurer le degré de diversification des entreprises performantes. Il faudrait prendre en compte toutes les entreprises et tester la relation entre leur degré de diversification et le niveau de performance. Les résultats des études utilisant cette démarche (scientifique !) sont sensiblement différents de ceux de Chris Zook. Ils indiquent que les entreprises modérément diversifiées sont plus performantes que les entreprises faiblement (et fortement) diversifiées.

En bref, attention au « benchmarking ». Imiter les meilleurs ne mène pas obligatoirement au succès …

1 commentaire:

  1. Bravo et merci d'avoir initié ce blog. En espérant que vous allez parvenir à l'actualiser régulièrement.

    Bonne rentrée. cordialement.

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