jeudi 26 février 2015

Faut-il écouter les analystes financiers ?



Alors qu’une entreprise ne peut pas espérer d’avantage concurrentiel sans stratégie originale, les analystes financiers sont très frileux. Que faire ?

Les analystes financiers et leurs objectifs

Les banques d’affaires fixent deux grands objectifs à leurs analystes financiers. Le premier objectif est qualitatif : réaliser les analyses les plus fiables possible. Le second objectif est quantitatif : « suivre » le plus grand nombre d’entreprises possible.

Pour atteindre ces objectifs, les analystes financiers ont tendance à se concentrer sur les entreprises dont les stratégies sont les plus faciles à comprendre. Cela leur permet d’améliorer la fiabilité de leurs analyses … tout en réduisant le temps nécessaire pour les réaliser. Lorsque la stratégie d’une entreprise est trop difficile à comprendre, ils peuvent même lui demander d’en changer !

A la fin des années 1990, Monsanto était présente dans trois domaines d’activité : les produits pharmaceutiques, les produits chimiques agricoles et les biotechnologies. Pour suivre une entreprise aussi diversifiée que Monsanto, les banques d’affaires devaient faire appel à trois analystes financiers (un pour chaque activité …). L’une d’entre elles (PaineWebber) avait alors fait la recommandation suivante : scinder l’entreprise en trois … pour qu’elle soit plus facile à évaluer !

Les stratégies originales : peu appréciées par les analystes financiers … mais valorisées par le marché

Les stratégies originales présentent un paradoxe. D’un côté, une entreprise ne peut pas espérer d’avantage concurrentiel si elle n’a pas une stratégie originale. D’un autre côté, les stratégies originales sont les plus difficiles à comprendre. On peut alors être tenté d’opter pour une stratégie moins originale …mais également moins susceptible de donner lieu à un avantage concurrentiel. Que faire ?

Pour le savoir, Lubomir Litov, Patrick Moreton et Todd Zenger ont étudié un échantillon de 7.630 entreprises sur une période de 23 ans. Ils ont considéré que plus une entreprise était présente dans des domaines d’activité différents de ceux de ses principaux concurrents, plus sa stratégie était originale.

Comme on pouvait s’y attendre, les entreprises qui ont une stratégie originale sont moins suivies par les analystes financiers. Si les analystes financiers décident malgré tout de les suivre, elles obtiennent de moins bonnes évaluations que leurs concurrents. Dans les deux cas, cela contribue à dégrader leur cours de bourse.

Faut-il alors renoncer aux stratégies originales ? Pas forcément. Malgré le mauvais accueil des analystes financiers, l’influence de l’originalité de la stratégie sur le cours de bourse reste positive. Les entreprises ont donc plutôt intérêt à avoir une stratégie originale !

vendredi 6 février 2015

Qu’est-ce qu’une entreprise agile ?



Plus les évolutions de l’environnement sont difficiles à anticiper, plus une entreprise doit être agile. Mais est-ce suffisant pour connaître le succès ?

L’agilité : nécessaire quand l’environnement est imprévisible

On fait parfois un parallèle entre les dirigeants d’entreprises et les capitaines de navires. Armé de ses jumelles, le capitaine de navire scrute le lointain et fixe le cap. Le dirigeant d’entreprise est censé faire la même chose … mais il se heurte de plus en plus à un brouillard impénétrable.

Que faire quand les évolutions de l’environnement sont difficiles (voire impossibles) à anticiper ? Une solution consiste à développer son agilité. Qu’est-ce que l’agilité ? D’après Donald Sull, elle peut être définie comme la capacité d’une entreprise à repérer et à tirer profit des opportunités dans l’environnement plus rapidement que ses concurrents.

Trois types d’agilité

Trois types d’agilité peuvent être distingués :
  • l’agilité opérationnelle est la capacité à identifier et exploiter des opportunités dans le cadre d’un Business Model existant. Par exemple, Zara sait particulièrement bien repérer les tendances émergentes dans le secteur de la mode. Sa chaîne de valeur est également configurée pour lui permettre de produire et de livrer les vêtements le plus rapidement possible ; 
  • l’agilité de portefeuille est la capacité a réallouer rapidement ses ressources d’une activité à autre (en fonction de leur attractivité …). Par exemple, General Electric est connue pour faire continuellement évoluer son périmètre d’activité ;
  • l’agilité stratégique est la capacité à repérer et identifier et exploiter les opportunités qui provoquent un changement complet des règles du jeu. Par exemple, Apple a tiré profit de la convergence entre le monde de la musique et le numérique pour lancer l’iPod et iTunes.

L’agilité : nécessaire … mais pas suffisante
Lorsque l’environnement est imprévisible, l’agilité devient une nécessité. Toutefois, elle n’est pas suffisante pour connaître le succès. Les opportunités les plus prometteuses sont rares (elles suivent une « loi de puissance inversée » : leur fréquence est inversement corrélée à leur amplitude). Il faut donc être capable d’absorber les chocs jusqu’à ce qu’elles se matérialisent.

L’exemple d’Apple illustre bien l’importance d’allier agilité et capacité à absorber les chocs. Avec le lancement de l’iPod et d’iTunes, Apple a saisi une opportunité qui a révolutionné le monde de la musique (agilité …). Toutefois, rien de tout cela n’aurait été possible si un petit noyau de clients fidèles ne lui avait pas permis de survivre … alors que sa part de marché dans les PC était tombée à moins de 5% (capacité à absorber les chocs).

En bref, l’agilité est nécessaire mais pas suffisante lorsque les évolutions de l’environnement sont difficiles à anticiper. Il faut aussi être capable d’absorber les chocs en attendant que les opportunités finissent par se présenter !