lundi 31 août 2015

Les entreprises sont-elles myopes ?



Les entreprises sont parfois tentées de « booster » leur rentabilité à court terme en réduisant leurs investissements. Ont-elles vraiment intérêt le faire ?


Améliorer la performance … en réduisant les investissements
Sous la pression des marchés, les entreprises sont parfois tentées d’améliorer artificiellement leur rentabilité à court terme en réduisant leurs dépenses de R&D et de marketing. Comme un tel comportement est peu susceptible d’être bénéfique à long terme, Natalie Mizik le qualifie de management myope.

La myopie managériale est-elle fréquente ? Comment les marchés réagissent-ils face aux entreprises qui en font preuve ? Pour le savoir, Mizik a étudié un échantillon de 6.642 entreprises américaines cotées sur une période de vingt ans.

Management myope et cours de bourse
Le management myope est très répandu dans le monde des affaires. Les résultats de l’étude montrent que 40% des entreprises qui affichent une rentabilité supérieure à la normale (c’est-à-dire ce que leur rentabilité passée et les conditions économiques permettaient d’anticiper …) le doivent à des dépenses de R&D et de marketing inférieures à la normale.

A court terme, le management myope est bénéfique. L’année où les entreprises myopes obtiennent une rentabilité supérieure à la normale, leur cours de bourse s’apprécie de 12,5%. Cette évolution est comparable à celle des entreprises qui ont obtenu une rentabilité supérieure à la normale sans sabrer dans leurs investissements (+ 15,5%) … et très supérieure à celle des entreprises qui ont obtenu une rentabilité inférieure à la normale … en partie parce qu’elles ont refusé de toucher à leurs investissements (-14,2%).

C’est par la suite que les choses se gâtent. Au bout de quatre ans, le cours de bourse des entreprises myopes a décroché de 15,7% … alors que celui des entreprises du deuxième groupe a augmenté de 29,2%. Même les entreprises du troisième groupe finissent par les dépasser (+ 13,3%) !

Quels enseignements ?
De nombreuses entreprises améliorent artificiellement leur performance à court terme en réduisant leurs investissements. Ce n’est pas une bonne décision ! Les marchés se rendent vite compte de la supercherie … et la sanction est sévère. Surtout, les entreprises myopes ne parviennent pas à redresser la barre parce que leur capacité d’innovation a décliné et que leur marque s’est dévalorisée.

Pour que la situation change, il faudrait que la rémunération des dirigeants soit moins indexée sur la performance à court terme. Il faudrait sans doute aussi qu’elle prenne (mieux) en compte des critères non financiers …

jeudi 27 août 2015

Pourquoi est-il aussi important pour une entreprise d’avoir une raison d’être ?



La plupart des entreprises n’ont pas de « vraie » raison d’être. Elles ont alors les plus grandes difficultés à connaître le succès.


Qu’est-ce que la raison d’être d’une entreprise ?
Comme l’a rappelé Cynthia Montgomery, la raison d’être est ce qui définit une entreprise de la manière la plus fondamentale possible : pourquoi existe-t-elle ? Qu’est-ce qu’elle apporte vraiment à ses clients ? Qu’est-ce qui la distingue de ses concurrents ?

On pourrait penser que la raison d’être est un concept trop abstrait pour être utile aux managers. C’est une erreur car il est beaucoup plus facile de prendre des décisions lorsqu’une entreprise a une raison d’être. L’histoire suivante a été racontée par le PDG de Southwest Airlines, une entreprise américaine qui se définit comme « LA compagnie aérienne à petits prix ». Après avoir réalisé une étude de marché, le directeur marketing lui aurait proposé de servir des sandwiches au poulet sur certaines lignes. La réponse du PDG : « Etes-vous sûr que servir des sandwiches au poulet fera de nous LA compagnie aérienne à petits prix sur ces lignes ? Si ce n’est pas le cas, il est hors de question que nous le fassions ! »

Qu’est-ce qu’une « vraie » raison d’être ?
 Il n’y a pas de recette pour développer une « vraie » raison d’être. Toutefois, deux règles d’or doivent être respectées. D’une part, il faut partir d’un besoin du client (non satisfait ou mal satisfait par les concurrents). La « maximisation de la valeur pour l’actionnaire » fait rarement une bonne raison d’être ! D’autre part, il faut rechercher la singularité.

La raison d’être d’entreprises comme IKEA (« Proposer une vaste gamme d’articles d’ameublement, esthétiques et fonctionnels, à des prix si bas que le plus grand nombre pourra les acheter »), Google (« Organiser les informations à l’échelle mondiale dans le but de les rendre accessibles et utiles à tous ») et Nike (« Apporter l'inspiration et l'innovation à tous les athlètes dans le monde ») remplit ces deux critères. Elle leur permet de répondre à un véritable besoin. Elle les rend également uniques.

Trois questions
Une entreprise a-t-elle une « vraie » raison d’être ? Pour le savoir, il suffit souvent de poser les trois questions suivantes à son dirigeant :
  • si votre entreprise disparaissait, qui la regretterait vraiment (à part vous …) ? 
  • à quels clients manquerait-elle le plus et pourquoi ? 
  • combien de temps faudrait-il pour qu’un concurrent comble le vide qu’elle laisserait ?

Lorsque les réponses sont « personne », « aucun » et « très peu de temps », l’entreprise n’a pas de raison d’être. Il est alors temps d’en formuler une … et (surtout) de la concrétiser !