mardi 5 février 2013
Que doit faire une entreprise en période de récession ?
En période de récession, les entreprises ont souvent tendance à réduire leurs coûts. Est-ce vraiment la bonne solution ? N’auraient-elles pas plutôt intérêt à investir ? Ou à faire les deux ?
Ranjay Gulati, Nitin Nohria et Franz Wohlgezogen ont récemment étudié un échantillon de 4.700 entreprises américaines pendant trois périodes de récession : 1980-1982, 1990-1991 et 2000-2002 (la période actuelle n’est pas encore prise en compte …). Leurs résultats sont assez déprimants : 17% des entreprises ont fait faillite et près de 80% d’entre elles n’ont jamais retrouvé leur niveau de performance préalable. En revanche, 9% d’entre elles en sont sorties plus fortes qu’avant (aussi bien en termes de croissance que de rentabilité). Comment ont-elles fait ? Si plusieurs stratégies peuvent être adoptées en période de récession, seule l’une d’entre elles est optimale …
La stratégie défensive
La stratégie défensive consiste à mettre l’accent sur la réduction des coûts et à repousser les investissements à des jours meilleurs. Si cette stratégie est très courante, les résultats de l’étude montrent qu’elle n’est pas forcément optimale. En moyenne, les entreprises qui la mettent en oeuvre n’ont que 21% de chances de sortir d’une récession plus fortes qu’avant. Pourquoi ? La réduction des coûts mène souvent à une dégradation de la qualité … et à une baisse de la satisfaction des clients. Elle conduit également à une démobilisation du personnel et à la destruction de certaines compétences. Lorsque la croissance est de retour, l’entreprise est affaiblie … et elle ne parvient pas à « redémarrer ».
La stratégie offensive
La stratégie offensive consiste à se servir d’une récession comme d’une occasion pour investir massivement. Les entreprises qui adoptent cette stratégie profitent notamment de la morosité ambiante pour racheter des concurrents à vil prix. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, cette stratégie donne de meilleurs résultats que la stratégie défensive. En moyenne, les entreprises qui la mettent en oeuvre ont 26% de chances de sortir de la récession plus fortes qu’avant. Toutefois, cette stratégie n’est pas optimale car elle conduit souvent à nier la gravité de la crise et à refuser de faire les ajustements nécessaires (essentiellement en matière de réduction des coûts).
La stratégie mixte
La stratégie mixte consiste à jouer simultanément sur les deux tableaux. A première vue, réduire les coûts (pour accroître ses chances de survie pendant la récession …) tout en investissant (pour être prêt à « redémarrer » après la récession …) ne semble pas être une démarche révolutionnaire. Elle est pourtant difficile à mettre en œuvre. En effet, il existe trois manières de réduire les coûts (réduire les effectifs, améliorer l’efficience opérationnelle ou faire les deux) et trois manières d’investir (investir dans des actifs immatériels comme le marketing et la R&D, investir dans des actifs matériels comme de nouvelles usines ou faire les deux). Au total, cela fait donc neuf combinaisons … dont l’efficacité varie sensiblement. Surtout, la stratégie mixte génère des tensions au sein de l’entreprise car il est toujours difficile de demander des sacrifices à certains tout en investissant sur d’autres …
En moyenne, les résultats de l’étude suggèrent que les entreprises qui optent pour l’une des neuf combinaisons ont 29% de chances de sortir de la récession plus fortes qu’avant. Mieux, l’étude montre qu’une des neuf combinaisons surclasse toutes les autres. Cette combinaison optimale consiste à réduire les coûts en accroissant l’efficience opérationnelle (plutôt qu’en réduisant les effectifs …) tout en investissant à la fois dans les actifs immatériels et matériels. En moyenne, les entreprises qui l’utilisent ont 37% de chances de sortir de la récession plus fortes qu’avant.
En résumé, les entreprises qui ont le plus de chances de sortir renforcées d’une période de récession sont celles qui optent pour une stratégie mixte. Elles sont conscientes qu’il est nécessaire de réduire les coûts pour survivre … mais elles n’hésitent pas non plus à investir pour l’avenir.
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