Les entreprises auraient peut-être plus intérêt à écouter les chercheurs en management ...
En 2001, Ed Michaels, Helen Handfield-Jones et Beth Axelrod (trois consultants du cabinet McKinsey) publient un ouvrage intitulé The War for Talent. Leur message est limpide. Pour battre ses concurrents, une entreprise doit commencer par gagner la « guerre du talent ». Cela nécessite notamment d’attirer et de fidéliser le plus grand nombre de « stars » possible (les A players) … en les payant beaucoup plus que les autres employés (les B players et surtout les C players). Peut-on se fier à cette analyse ? D’après Jeffrey Pfeffer et Robert Sutton, la réponse est : « non » … pour deux raisons.
D’une part, la recherche des trois consultants ne tient absolument pas la route. Pour valider leur « théorie », ils ont commencé par évaluer la façon dont une centaine d’entreprises géraient leurs « talents » en 2000. Puis, ils ont fait le rapprochement avec leur performance dans les années 1990 … En d’autres termes, ils ont montré que la façon dont les entreprises gèrent leurs talents « aujourd’hui » explique leur performance « hier » ! S’ils avaient étudié le lien entre le tabagisme et le cancer du poumon, cela serait revenu à montrer que le cancer du poumon provoque le tabagisme …
D’autre part, les trois consultants n’ont absolument pas tenu compte des centaines d’articles de recherche qui ont étudié la relation entre la dispersion des salaires et la performance des entreprises. La quasi-totalité de ces articles a abouti à la même conclusion … diamétralement opposée à celle de The War for Talent. Lorsqu’une activité demande un minimum de collaboration entre les employés d’une même entreprise, plus les écarts de salaires sont élevés, moins l’entreprise est performante !
Ce phénomène a été observé dans de nombreux domaines. Ainsi, une étude a montré que les équipes de baseball dans lesquelles l’écart entre le joueur le plus payé et le joueur le moins payé est le plus important sont celles qui gagnent le moins souvent leurs matchs. Elles attirent également moins de spectateurs et d’annonceurs. Une autre étude a montré que plus l’écart de salaire entre le PDG et les employés d’une entreprise est important, moins la qualité de ses produits est élevée. La liste est interminable …
En bref, mieux vaut se fier à la recherche en management qu’aux études des consultants … Comme elle reste confidentielle, elle peut donner un véritable avantage aux entreprises qui font l’effort de s’y intéresser !
Sources :
Michaels, E., Handfield-Jones, H., & Axelrod, B. (2001), The war for talent, Harvard Business School Press.
Pfeffer, J., & Sutton, R. (2006), Hard facts, dangerous half-truths, and total nonsense, Harvard Business School Press.
En 2001, Ed Michaels, Helen Handfield-Jones et Beth Axelrod (trois consultants du cabinet McKinsey) publient un ouvrage intitulé The War for Talent. Leur message est limpide. Pour battre ses concurrents, une entreprise doit commencer par gagner la « guerre du talent ». Cela nécessite notamment d’attirer et de fidéliser le plus grand nombre de « stars » possible (les A players) … en les payant beaucoup plus que les autres employés (les B players et surtout les C players). Peut-on se fier à cette analyse ? D’après Jeffrey Pfeffer et Robert Sutton, la réponse est : « non » … pour deux raisons.
D’une part, la recherche des trois consultants ne tient absolument pas la route. Pour valider leur « théorie », ils ont commencé par évaluer la façon dont une centaine d’entreprises géraient leurs « talents » en 2000. Puis, ils ont fait le rapprochement avec leur performance dans les années 1990 … En d’autres termes, ils ont montré que la façon dont les entreprises gèrent leurs talents « aujourd’hui » explique leur performance « hier » ! S’ils avaient étudié le lien entre le tabagisme et le cancer du poumon, cela serait revenu à montrer que le cancer du poumon provoque le tabagisme …
D’autre part, les trois consultants n’ont absolument pas tenu compte des centaines d’articles de recherche qui ont étudié la relation entre la dispersion des salaires et la performance des entreprises. La quasi-totalité de ces articles a abouti à la même conclusion … diamétralement opposée à celle de The War for Talent. Lorsqu’une activité demande un minimum de collaboration entre les employés d’une même entreprise, plus les écarts de salaires sont élevés, moins l’entreprise est performante !
Ce phénomène a été observé dans de nombreux domaines. Ainsi, une étude a montré que les équipes de baseball dans lesquelles l’écart entre le joueur le plus payé et le joueur le moins payé est le plus important sont celles qui gagnent le moins souvent leurs matchs. Elles attirent également moins de spectateurs et d’annonceurs. Une autre étude a montré que plus l’écart de salaire entre le PDG et les employés d’une entreprise est important, moins la qualité de ses produits est élevée. La liste est interminable …
En bref, mieux vaut se fier à la recherche en management qu’aux études des consultants … Comme elle reste confidentielle, elle peut donner un véritable avantage aux entreprises qui font l’effort de s’y intéresser !
Sources :
Michaels, E., Handfield-Jones, H., & Axelrod, B. (2001), The war for talent, Harvard Business School Press.
Pfeffer, J., & Sutton, R. (2006), Hard facts, dangerous half-truths, and total nonsense, Harvard Business School Press.
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